– Des PME pleurent déjà Horizon Europe
L’éviction de la Suisse du programme Horizon Europe est aussi une mauvaise nouvelle pour nos PME innovantes.
OpinionMichel Matter, Conseiller national
Publié aujourd’hui à 06h52
Malheureusement, les conséquences fâcheuses de la décision du Conseil fédéral de mettre abruptement fin aux négociations institutionnelles avec l’UE ne se sont pas fait attendre. Le 22 juin dernier, l’UE s’est résolue à évincer notre pays du programme de recherche Horizon Europe doté de près de 100 milliards d’euros pour la période 2021-2027. Cette mesure, forte et relativement inattendue, est un indicateur tangible de la détérioration des relations entre l’UE et la Suisse.
En effet, d’autres pays tiers, tels que le Royaume-Uni et Israël, gardent un accès à ce programme en tant que pays associés. Même si cette éviction n’est pas encore définitive, tout porte à croire que rien ne sera plus comme avant entre Berne et Bruxelles. La voie bilatérale qui nous a apporté une ère de stabilité et de prospérité de près de vingt ans commence à s’éroder sérieusement. Au fur et à mesure que de nouvelles barrières commerciales se dresseront entre nous et le plus grand marché du monde, cette voie bilatérale ne présentera plus autant d’avantages qu’aujourd’hui et la Suisse sera de plus en plus isolée sur le continent.
Ces derniers jours, plusieurs commentaires ont souligné, à juste titre, que la sortie de la Suisse du programme Horizon Europe portera grandement atteinte à la compétitivité des universités et autres hautes écoles suisses. Ces dernières se trouvent en effet au centre d’un excellent réseau européen de recherche financé en grande partie par l’UE. Toutefois, peu d’observateurs ont relevé que le programme Horizon Europe, par son troisième pilier, finançait aussi les PME et les start-up innovantes avec des bourses de l’ordre de 2-3 millions d’euros qui sont en réalité des subventions directes.
Plusieurs entreprises suisses, particulièrement à Genève, qui a un taux très élevé de succès sur ces bourses, en ont bénéficié. C’est le cas, par exemple, d’ID Quantique de MaxiVax ou encore de ProtonMail. Cette dernière entreprise, aujourd’hui bien connue du grand public, a reçu 2 millions d’euros de l’UE en 2019 et est devenue le plus grand service de messagerie électronique sécurisé du monde. Hélas, de telles subventions directes visant à favoriser l’innovation n’existent pas dans notre pays («Innosuisse» – l’agence suisse pour l’encouragement de l’innovation – n’en accorde pas). Pourtant, l’écosystème suisse très innovant aurait besoin de tels instruments de subventionnement pour garder une longueur d’avance sur ses concurrents.
Ainsi, l’éviction de la Suisse du programme Horizon ne pourra être partiellement compensée par des mesures internes, du moins pas à court terme. Cette situation est particulièrement problématique car ces entreprises sont de grandes pourvoyeuses d’emplois à haute valeur ajoutée pour notre pays et surtout pour la région lémanique, qui demeure l’une des plus dynamiques de Suisse.
Dans les prochains mois, je me battrai avec mes collègues du Parti vert’libéral et avec toutes les autres bonnes volontés du parlement pour faire en sorte que le secteur de l’innovation puisse préserver les meilleures conditions-cadres possibles dans un contexte économique et politique dégradé. Une telle action passera certainement par la proposition de nouvelles mesures d’encouragement à l’innovation. La Suisse doit être plus ambitieuse pour rester compétitive dans un monde où la recherche et le développement deviennent critiques pour la compétitivité économique.
Bien que nécessaires, ces nouvelles mesures ne remplaceront toutefois pas de bonnes relations avec notre principal débouché commercial: l’UE. C’est la raison pour laquelle il conviendra aussi de retourner à la table des négociations institutionnelles avec Bruxelles ou alors, faute de mieux, d’envisager de nouvelles formules d’association avec l’UE, telles que l’Espace économique européen. La prospérité de plusieurs de nos fleurons économiques (medtech, industrie des machines, pharma, start-up, etc.) et le maintien de nombreux emplois à forte valeur ajoutée en Suisse en dépendent. Notre avenir économique se joue aujourd’hui!
Conseiller national Vert’libéral
DR
Publié aujourd’hui à 06h52
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