– Compétences numériques… il y a du boulot!
OpinionDr Philippe Amez-Droz, chargé de cours au Medialab, Université de Genève
Publié aujourd’hui à 08h12
Quelles sont les compétences numériques des Suisses en 2019 et quelles sont les principales faiblesses observées auprès d’un échantillon représentatif de 3000 personnes? Une étude publiée en avril dernier par l’Office fédéral de la statistique le détaille et il vaut la peine de s’y pencher pour relever que l’arbre de la connaissance numérique cache une forêt bien épaisse d’ignorance.
Intitulée sobrement «Répartition inégale des compétences numériques parmi les utilisateurs d’internet en Suisse», elle permet de définir plus précisément les compétences numériques en matière d’usage des technologies de l’information et de la communication. Ces compétences sont au nombre de quatre: d’information, de communication, de résolution des problèmes et d’utilisation des logiciels pour la création. L’étude propose trois principales distinctions: pas de compétences, compétences basiques, compétences plus que basiques.
81% des personnes disposent de compétences qualifiées de «plus que basiques» en matière d’information et 7% de basiques. Il est vrai que les activités décrites comme des compétences informationnelles consistaient à «copier ou déplacer des fichiers/dossiers, utiliser de l’espace en ligne pour la sauvegarde de documents, images, musique, vidéo, chercher de l’information administrative ou relation avec la santé», notamment. Pas d’information au sens journalistique. Rien que du basique.
«L’enquête se révèle très utile pour saisir l’importance du travail de formation continue nécessaire aux générations actives, entre 25 et 55 ans.»
La définition de la compétence de communication relève aussi d’aptitudes sommaires: envoyer ou recevoir des mails, utiliser des applications telles que Skype ou WhatsApp, participer à un réseau social ou mettre en ligne du contenu généré par soi-même. Là aussi, la population observée rassure, avec 16% de compétences basiques et 75% de plus que basiques. Des taux assez proches en ce qui concerne la résolution des problèmes avec, respectivement, 17 et 70%. Ces problèmes consistaient à: acheter ou vendre quelque chose en ligne, transférer des fichiers, installer des logiciels ou des applications, suivre un cours en ligne, faire de l’e-banking, etc. Du basique, encore.
Dernière compétence étudiée, l’utilisation de logiciels pour la création: traitement de texte, Excel, édition de contenus photos ou vidéo, création de présentations, codage, programmation. Les personnes recensées comme disposant de compétences basiques s’élèvent à 21%, contre 55% plus que basiques et 17% qui n’ont aucune compétence. Sans surprise, l’âge, l’éducation et la catégorie professionnelle permettent d’identifier les personnes à plus faibles compétences numériques. Le statut migratoire, la situation financière du ménage et le nombre d’enfant(s) dans le ménage sont aussi pris en considération. Ainsi, un ménage sans enfants de moins de 16 ans présentera plus de risques de faibles compétences numériques (21%) qu’un ménage avec au moins un enfant (15%).
L’enquête se révèle finalement très utile pour saisir l’importance du travail de formation continue nécessaire aux générations actives, entre 25 et 55 ans, pour ne pas décrocher d’un marché du travail fortement digital. 31% des personnes observées dans ces tranches d’âge présentent de faibles compétences numériques. Les facteurs de risque sont identifiés et leurs origines, dans la population suisse, soulignent d’indéniables inégalités. En a-t-on vraiment conscience?
Dr Philippe Amez-Droz, chargé de cours au Medialab, Université de Genève
Publié aujourd’hui à 08h12
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